Yves M. Larocque

Apocalypse

Cette œuvre conceptuelle a été réalisée en 2019 aux balbutiements de l’Anthropocène. À l’échelle de l’histoire humaine, elle est aussi née au moment où la Modernité rendait son dernier souffle. Coïncidence ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Tout de même, la trace d’une paume a été laissée sur une paroi à Lascaux et une autre, sur une toile baptisée Mains s’envolant vers les constellations (1974). Et juste avant, dans sa Toile brûlée, Miró n’invoquait-il pas le feu de la Terre ? Entre les deux traces de main s’est déroulée toute l’Histoire et toute l’histoire de l’Art, de l’Holocène à l’Anthropocène. La première trace de main remonte à l’époque du potentiel d’une nature en devenir : les taureaux dansent. La seconde correspond à l’époque d’un déchaînement du climat : les forêts brûlent. Déjà en 1320, Dante aussi avait eu lui aussi une prémonition. Six siècles dans l’histoire de notre planète, ce n’est qu’un microquark. Ah, ces artistes, de grands visionnaires.

Aujourd’hui, des êtres appartenant aux quatre premiers pays émetteurs de CO2 de la planète se proclament « artistes » … sur Facebook. Ce sont là les premiers « artistes » de l’Anthropocène. Avec le gaz carbonique, les jaunes et rouges de cadmium, le bleu de cobalt, on s’adonne à cœur joie à une représentation médiocre, à une mimèsis ennuyeuse, avec une palette bouseuse…

(je souffle)… (je reprends)…

Sur l’interface FB, pouces levés, émojis aux yeux étoilés, cœurs rouges, minou rose souriant, applaudissements silencieux… Fustigeons l’art éternel. « Maudit sois-tu, Duchamp ! Romano, c’est qui ? Cézanne ? » On se cache sous l’épais édredon DEL de la routine, du confort, de la vanité, de l’habitude, de l’insouciance. Destruction de la planète et aussi de l’Art, Facebook cautionne, quatrième cavalier de l’Apocalypse après le Néo-pharmacopeur, le Pétroleur et l’Assureur. La peur favorise le silence au détriment d’une véritable critique.

Adieu Sublime, Transcendance, Volupté, Nature, Grâce et… Dieu.

Yves M. Larocque (1957) (doctorat, Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne) est professeur, médialogue, historien de l’art et peintre. Il a étudié auprès de René Payant, Josée Vovelle et Jacques Derrida. Yves M. Larocque se spécialise en médialogie de l’art canadien. Il enseigne l’histoire de l’art et la peinture depuis plus de 30 ans à l’École d’art d’Ottawa ; il est aussi le fondateur-directeur de Walk the Arts. Il a de nombreuses expositions à son actif. Il participe à des émissions de radio et de télévision, à des revues d’art, à des conférences et à des congrès dans le monde des arts. 

 

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