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Nos expositions

L’IMAGE QUI BRUIT/CINQ TEMPS BRAVO

En 1991, des consultations à l’échelle de la province ont permis aux artistes visuels de langue française en Ontario de définir les attentes et les besoins dans leurs disciplines artistiques. Ayant identifié des exigences communes, les artistes ont fait un premier pas : ils ont formé un comité à dix, avec le mandat d’élaborer le plan de développement d’un organisme provincial en conformité avec les résultats des consultations régionales. L’assemblée de fondation de BRAVO, le Bureau des regroupements des artistes visuels de l’Ontario, s’est tenue à Ottawa les 16 et 17 novembre 1991 et un an plus tard, le 18 novembre 1992, l’organisme acquérait son statut officiel comme association d’artistes francophones consacrée aux arts visuels en Ontario.

Depuis quinze ans, le paysage des arts visuels en Ontario français s’est complètement métamorphosé pour plusieurs raisons : les artistes diplômés se sont multipliés en apportant du leadership; une immigration francophone qui adopte l’Ontario comme terre d’accueil s’est consolidée; des cinéastes se sont joints à l’association. Des membres et des bénévoles actifs et informés y travaillent et persistent à demeurer artistes francophones dans une province toujours unilingue anglophone. Cette évolution a mené BRAVO à une professionnalisation dont témoigne cette exposition L’image qui bruit, pour souligner le 15e anniversaire de fondation et d’incorporation. L’efficacité organisationnelle et l’effectif de BRAVO lui ont permis d’élargir son champ d’action avec l’inauguration d’une première galerie francophone à Ottawa, Voix Visuelle, et le musée des arts visuels franco-ontarien sur la toile (www.mavfo.org). Un nouveau satellite incubé par la régionale de BRAVO-Sud, Le LABORATOIRE D’ART, s’est aussi ouvert à Toronto.

Aujourd’hui, dans le cadre de son 15e anniversaire, BRAVO, la seule association d’artistes francophones consacrée aux arts visuels et aux arts médiatiques en Ontario, se réjouit de présenter un événement qui témoigne éloquemment de ces quinze années d’action en faisant état des réalisations récentes de ses membres. Il souligne la production et la diffusion qui se font dans les quatre régionales de l’Ontario et remercie les galeries qui se sont associées au projet : Voix Visuelle, Le LABORATOIRE D’ART, La Galerie du Nouvel-Ontario, La Galerie Glendon et la Galerie 815. Sans leur participation, il aurait été difficile de rendre compte du chemin parcouru ces quinze dernières années dans les arts visuels francophones de l’Ontario.

Yves M. Larocque et Luce Marquis
bravo/15 ans

Cinq expositions indépendantes sont réunies par le propos très large de la mouvance de l’image et des nouveaux territoires qui se profilent avec l’utilisation des outils numériques.

Les oeuvres des sept artistes participants conjuguent chacune un temps de la déclinaison : redéfinition de l’image photographique par la numérisation, altération du réel convenu dans l’incessant mouvement entre la matérialité et le virtuel, métissage de la vidéo et de l’interactivité ou, encore, introduction d’écritures venues d’ailleurs qui s’immiscent dans la trame du social désormais fluide. L’extension et la pénétration de l’esthétique numérique ne se heurtent plus aux balises géographiques et voyagent sans contraintes d’un territoire à l’autre. Il y a là une situation qui facilite les relais entre des groupes éloignés par la distance mais réunis instantanément dans ce nouvel espace d’information. La mobilité et l’évolution transversale des cultures transforment le paysage de l’identité. Pour les minorités qui peinaient jusqu’à tout récemment à asseoir leur présence hors de leur sphère immédiate, il y a là une ouverture, une brèche inespérée pour échapper à la réduction géographique et pour participer aux échanges continentaux. Les galeries qui accueillent les différentes expositions de l’événement L’image qui bruit sont emblématiques des réseaux qui existent maintenant en Ontario français pour soutenir la diffusion d’un nombre grandissant d’artistes, ceux-ci ayant aussi une association pour les représenter. On mesure la distance parcourue ces dernières années. Mais en faisant un arrêt-clic sur le présent, on constate également que la consolidation de toutes les instances est indispensable pour l’avenir des pratiques artistiques sur ce territoire.

La Galerie du Nouvel-Ontario, Sudbury :: 06.01 – 11.02.2007
La Galerie du Nouvel-Ontario, devenue en 1995 le premier centre d’artistes autogéré en Ontario français, est issue de la mouvance artistique marquante des années 1970 à Sudbury

« Dans mon œuvre (…) inspirée de la pièce de Molière, je tente de saisir l’image séculaire des femmes en quête de savoir et de connaissances ». Annonçant sans ambages les assises de son projet, Nicole Croiset entreprend d’en actualiser la démonstration avec les moyens de la femme nouvelle :: Cinq panneaux constitués de disques compacts forment l’épiderme réactif d’une surface animée de DEL (diodes électroluminescentes) qui s’allument pour créer un clignotement aléatoire. Les lumières se focalisent à l’approche du visiteur pour déclencher l’enchaînement d’une succession de mots en boucle : FEMMES SAVANTES FEMMES DE SAVOIR-FAIRE SAVOIR DE FEMMES. Le défilement fait appel à la réitération et au glissement des mots l’un dans l’autre pour suggérer le flux continu qui caractérise l’histoire progressive des femmes. On ne peut la lire avec acuité, suggère l’œuvre interactive, qu’à ce point précis où le chaos de l’information lumineuse des DEL s’organise pour devenir un discours articulé qui dit son objet. : Un court film projeté en parallèle donne un visage aux femmes de savoir, évoquées génériquement dans la bande de mots continue. Les portraits d’Hypatie, Émilie du Châtelet, Ada Byron et Marie Curie illustrent le propos de l’artiste qui en assume ici le didactisme. : En liant l’image de la femme savante à des savoir-faire inédits et à des inventions bien documentées, Nicole Croiset rappelle que son insertion demeure malgré tout précaire dans une histoire qui s’écrit encore souvent sans elle. Pourtant selon la lunette que l’on emprunte et si l’on voit large, on constate que tous les champs du savoir – philosophiques, artistiques ou scientifiques – ont compté des femmes ayant transgressé l’exclusion ou l’interdit pour s’imposer et marquer l’espace social. :: L’œuvre interactive, modélisation d’une approche éclatée qui jumelle les faires technologiques à l’aventure intellectuelle, est elle aussi un terrain d’exploration pour l’artiste qui cherche à s’inscrire dans l’aventure de la prospection numérique.

La Galerie Glendon, Toronto :: 09.01 – 09.02.2007
Première galerie d’art publique ouverte à North York en 1977, la Galerie Glendon de l’Université York soutient des expositions d’art contemporain en milieu universitaire.

L’outil numérique ne transforme pas seulement la pratique de l’art mais aussi ses effets. Dans des œuvres antérieures, Paul Walty avait déjà accentué la pixellisation du dessin conséquente à la numérisation, pour altérer le coup de crayon d’apparence fluide et révéler les contours irréguliers et hachurés de la ligne agrandie plusieurs fois. Conçues d’abord comme des esquisses de petit format, quadrillées, découpées en sections puis imprimées pour recomposer des ensembles, les murales à l’allure très graphique de Paul Walty jouaient avec la notion d’échelle inhérente à toute perception : cette distance d’ajustement optique où l’image oscille entre le fragment et la totalité, entre l’appréhension locale et le balayage panoramique. : Sa nouvelle série autour des empreintes digitales s’inscrit à la fois dans cette fascination visuelle pour le fragment et le tout, et dans une réflexion élargie sur l’arsenal grandissant des contrôles biométriques qui confirment notre identité : lecture de l’iris, reconnaissance de la voix, code génétique.

Aussi ces empreintes de grand format, constituées à partir d’un matériel consenti par des particuliers, ont été assujetties à des filtres de manipulation. D’abord, le souci des sujets de ne pas donner une empreinte franche mais de la brouiller quelque peu au moment de la saisie pour mieux la dépersonnaliser. On ne sait jamais l’utilisation qui pourrait en être faite. Ensuite, une consigne de l’artiste requérant l’empreinte de l’index gauche exclusivement, directive qui singularise la gauche pour mieux insister sur le côté ombrageux qui lui est traditionnellement accolé. : À travers l’entreprise de fichage /décodage devenue l’obsession du temps, Paul Walty propose de revoir les codes visuels du dessin et de ses transmutations – signes ludiques construits avec des jeux d’échelle, de lignes, de couleurs, de combinatoires qui changent de sens selon l’optique retenue pour les enregistrer et les interpréter.

Lieu de diffusion BRAVO-Est, Ottawa : 09.03 – 19.04.2007
Le Lieu de diffusion BRAVO-Est, ouvert en 2005 dans le quartier de Vanier à Ottawa, accueille toutes les disciplines d’art actuel dans des expositions qui assurent la visibilité des artistes francophones.

À la croisée de la performance, de la photo et de la vidéo, l’installation de Jocelyne Belcourt Salem amalgame des langages et des courants différents. Sans réduire les moyens artistiques qu’elle emprunte, elle les sollicite pour circonscrire un espace dans lequel elle pose la question de la différenciation des états de conscience et des langues qui expriment les nuances de l’altérité. :: Dans une performance d’atelier, elle a d’abord demandé à huit participants d’écrire au mur noir avec une craie blanche la locution parfois je rêve dans leur langue d’origine, et de l’assortir de schémas ou d’idées associées. Ces marquages en français, russe, ukrainien, hongrois, créole, hébreu, farsi et maltais ont ensuite été cadrés, photographiés, tirés sur papier argentique et montés sous plexi pour être présentés dans une suite linéaire.: Comme autant d’abstractions, ces écritures parfois intrigantes et illisibles renvoient au tableau du savant qui tente d’ordonner le monde au moyen d’équations. Cependant les frontières entre le conscient, l’inconscient, le discours et le rêve sont perméables dans ces graphies polyglottes.

Les signes se côtoient sans nécessairement faire sens pour l’esprit. : Des oreillers, sur lesquels sont brodés en noir la même petite phrase parfois je rêve, accentuent l’idée de fracture entre le discours éveillé et l’inconscient sous-jacent. La forme tactile de l’objet mou et l’allusion directe au rêve qu’il induit prennent le relais du conscient pour évoquer une sphère de l’expérience qui échappe au langage et à la formule rationnelle. Une vidéo projetée au mur, enregistrement-témoin de la performance, diffuse le bruit de la craie utilisée par les participants qui répètent à haute voix en anglais sometimes I dream tout en l’écrivant dans leur langue d’origine. La performance, qui se dit en se faisant, éclaire les intrications des divers degrés de conscience. Leur fusion n’est pas annoncée dans ce travail qui, au contraire, évoque plutôt la différenciation des états et leur observation.

La Galerie 815, Hearst :: 06.04 – 02.05.2007
La Galerie 81 5, fondée en 1983 dans un garage à Hearst, est maintenant bien établie dans le centre culturel où elle poursuit un travail de sensibilisation aux arts avec une programmation éducative diversifiée.

Comment s’écrit l’identité individuelle ou collective à une époque de grandes migrations intercontinentales et d’abolition des distances par la communication en réseau ? Shahla Bahrami et Cécile Boucher construisent chacune un point de vue sur cette question et amènent le spectateur à des considérations issues d’une logique visuelle. Dans les impressions numériques de Cécile Boucher, les messages surannés de cartes postales se superposent aux images d’une urbanisation à la fois générique et localisée (Hong Kong, Lanzhou, Ottawa). Le personnage emblématique qui surgit en médaillon au cœur de chacune des compositions est lui-même un clone de deux ou trois individus fusionnés grâce à une opération numérique. Des enregistrements du message des cartes postales en langue étrangère accompagnent les images et annoncent le télescopage des expériences culturelles et leur mélange sans retour. :: Le concept d’identité s’ouvre à une autre dimension quand le voile islamique singularisé par Shahla Bahrami s’érige comme « le signe d’une féminité générique et un signe d’appartenance religieuse où l’individualisme cède le pas à l’identité collective ». Le tchador troublant se lit à la fois comme symbole de soumission et affichage d’une résistance aux pressions de la culture occidentale. La complexité de la lecture s’accentue lorsque des transferts photographiques de femmes voilées, rehaussés de peinture, sont apposés sur la calligraphie très régulière d’un poème persan de Ru¯mı¯. Les vers prescriptifs du poète coulent comme une rivière sur de longues bandes étroites de tissu et alternent avec des dialogues ou des aphorismes plus philosophiques sur l’amour et l’immatériel. :: Le visage à découvert, central au décodage de l’individualité si prisée en Occident, est toutefois questionné dans les portraits composites de Cécile Boucher. Cette identité construite sur mesure et modulée à souhait par l’imagerie, la chirurgie ou la génétique demeure-t-elle la référence absolue de la personne ? Sinon où réside-t-elle ?

Le LABORATOIRE D’ART, Toronto :: 15.06 – 30.06.2007
Le LABORATOIRE D’ART soutient les pratiques multidisciplinaires d’artistes francophones et facilite la réalisation de leurs projets au moyen d’équipements de production et d’une programmation artistique variée.

Le travail en collectif exige des artistes qu’ils renoncent à la signature individuelle de l’œuvre au profit d’une exploration commune. Plusieurs actions convergent dans le concept de Padejo pour aboutir à une installation qui confronte la technique traditionnelle du frottis à sa réinterprétation par le prisme de la vidéo. :: Lors d’excursions de prélèvements dans le district The Distillery à Toronto, les trois artistes ont consigné sur un support mou les détails de pierres, de poutres, d’objets divers abîmés par l’usage et le temps. Leur geste de frottage, qui s’apparente à une transcription littérale et à un enregistrement visuel, trace toutefois un parcours dominé par l’accident. Les grands papiers « frottés », témoins des sorties exploratoires, rappellent les cartes topographiques ou les clichés aériens d’une terre vue d’en haut. Lorsqu’ils sont apposés aux faces externes de la structure cubique qui définit l’installation, ces marquages monochromes invitent à faire une première lecture liée au survol et au balayage de surface. La mémoire des lieux visités s’exprime à travers l’usure, le poli, la texture qui marquent le papier et lui donnent le relief d’une plaque impressionnée.: Le processus exploité par les artistes et bien connu des amateurs de rubbings se précise dans une vidéo projetée au fond de la structure de l’installation. Le visiteur en dirigeant son regard vers l’écran placé en contrebas emprunte alors la perspective de celui qui survole le territoire. La vision frontale des grands dessins suspendus à l’extérieur du bloc cède à cet autre rapport d’observation en plongée, où l’échelle monumentale se renverse pour devenir le constat intimiste d’une incursion dans le monde des choses. :: Si les sondes spatiales renvoient des milliers d’images aux configurations étranges vers les récepteurs d’ondes terrestres, l’exploration par des artistes d’un quartier dans la ville peut aussi livrer des observations transmises par les moyens plus locaux du dessin et de la vidéo. Il suffit de positionner le regard et de régler son angle de vision pour capter un fragment d’univers à l’échelle réduite.

BRAVO/15 ans

Remerciements

Commissaire-conseil pour L’image qui bruit, recherche et textes : Marie-Jeanne Musiol
Conception graphique du catalogue : teixeiradesign.com
BRAVO/15 ans
Le Bureau des regroupements des artistes visuels de l’Ontario

C.P. 53004, Succ. Rideau, Ottawa (On) KIN IC5
ISBN : 0-9734922-4-4
www.bravoart.org
www.mavof.org

BRAVO/15 ANS remercie les artistes et les galeries qui les présentent ainsi que les personnes qui ont apporté leur appui à l’événement L’image qui bruit : Marc Audette, Shahla Bahrami, Dominique Banoun, Martine Becquet, Yves M. Larocque, Lina Payeur, Martine Rheault, Danielle Tremblay et Sacha Vandermarel.


La Galerie du Nouvel-Ontario, Sudbury | Ontario | www.gn-o.org
La Galerie Glendon, Toronto  | Ontario | www.glendon.yorku.ca/gallery
La Galerie 815, Hearst | Ontario | https://www.conseildesartsdehearst.ca/
Lieu de diffusion BRAVO-Est, Ottawa | Ontario | voixvisuelle@gmail.com
Le Labo (Le Laboratoire d’art), Toronto | Ontario | http://lelabo.ca/fr/

MAVOF

Le MAVOF - Musée des arts visuels de l’Ontario français voit le jour en 2006. Il est l’unique musée sur les arts visuels et médiatiques des artistes francophones de la province de l’Ontario au Canada.

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